Un invité surprise dans la campagne électorale

Publié le par cc jung in effect

L’actualité file à une telle vitesse qu’il n’est pas rare qu’une information importante nous passe sous le nez, furtivement et sans laisser de traces véritables. Tenez par exemple, cette stupéfiante nouvelle qui a filtré discrètement, celle d’une possible implication des terroristes d’Al Quaeda and Co dans la campagne des Présidentielles françaises. Le but de la manœuvre terroriste serait a priori de « punir » la France pour ses efforts en matière de lutte contre le terrorisme mais l’effet recherché est peut-être ailleurs. Petite analyse d’une information qui pourrait faire du bruit, plus tard…
 
 
Il y a parfois dans l’actualité des informations qui passent furtivement, habilement dissimulées dans le flot bouillonnant des catastrophes en cours et des trains qui n’arrivent pas à l’heure, des pépites éparpillées au milieu de l’affreux fait-divers en Corrèze qui vaut largement aux yeux du quidam, le génocide en cours au Zambèze. Il faut prendre alors son tamis tel un orpailleur halluciné, gratter fébrilement au milieu des alluvions de l’actualité, nettoyer ensuite ce caillou informe qui brille comme une promesse étoilée pour enfin prendre le temps de contempler la bête splendide. C’est un peu ce qui est arrivé à Omegalpha en tombant sur une dépêche sulfureuse qui n’a pas traîné à la Une des journaux.
 
 
Et pourtant, cette information là vaut son pesant de cacahuètes ou de mercure. Vous l’avez sans doute lu ou entendu cette nouvelle étonnante : Al Quaeda et son grand cirque sanglant devraient faire une date dans notre beau pays. Et pas n’importe quand puisque le barnum fondamentaliste avec ses hommes à barbes, ses fakirs à cutter et ses « hommes canons », a choisi de faire une halte en ville…pendant la campagne électorale. Voilà qui devrait faire une presque saine concurrence au « Sarkocircus » qui tourne en boucle depuis si longtemps dans nos contrées avec ses éculés numéros d'escamoteurs, son transformiste célèbre et ses écuyères boudinées. Voilà surtout qui interpelle et titille notre curiosité érigée en maladive paranoïa depuis le terrifiant bowling aérien de New York.
 
 
C’est une info distillée par le quotidien arabe de Londres, Al-Hayat, qui cite un rapport des services secrets français où il est question de « plusieurs indices sur l’existence d’un plan pour la répétition en France du scénario espagnol» précise la dépêche de Libération (lien). C’est donc un site d’informations arabe de Londres proche des Saoudiens qui « fuite » un rapport des services secrets français, pour résumer ce jeu de pistes. Le même journal donne quelques indications supplémentaires puisqu’il est question de « messages sur des sites internet proches d’al-Qaeda, comportant des menaces contre la France accompagnées de photos de la campagne pour l’élection présidentielle », une information contenue dans un rapport des services français qui fait « huit pages » et qui a été élaborée pendant une période de « trois mois ».
Autant de précisions ne nuisent pas à la révélation mais assurent une confortable crédibilité à la « fuite » sachant que ces prétendues irruptions de rapports secrets au grand jour ne doivent généralement rien au hasard. Un service secret évite, a priori, de mettre à la « Une » le fruit de ses patientes recherches dans l’ombre. Mais là, la menace est clairement identifiée puisqu’il est question… de quatre réseaux activés pour nous faire une paella espagnole plutôt pimentée. Les ennemis de la démocratie forment donc un groupe hétéroclite où se distinguent la branche des « irakiens » constituée de « volontaires d’origine européenne qui s’étaient rendus en Irak pour combattre dans les rangs des combattants de la branche irakienne d’Al-Qaeda. » et « « les Maghrébins liés au GSPC» (Groupe salafiste pour la prédication et le combat). Des deux autres réseaux de conspirateurs, aucune information ne filtre, black out total ou embargo journalistique.
 

Le vernis sémantique habituel pour habiller le message
 
On devra se contenter de ces pistes en demi-teinte et se rabattre sur les diatribes délirantes d’Al Quaida et d’Oussama Ben Laden le mort-vivant bavard. Le chef d’Al Quaida aurait envoyé une missive au GSPC pour ordonner de choisir la France et « les objectifs qui causeront le plus de douleur». Le fantôme holographique argumente même sa diatribe aliénée en indiquant que « ce pays infidèle a longtemps colonisé les pays musulmans. Aujourd’hui, il soutient de toutes ses forces la clique de mécréants qui gouverne en Algérie d’une main de fer ». La voix d’outre-tombe se fait même plus féroce puisqu’il est question d’un « droit légitime (qui)  consiste à le combattre y compris sur son propre territoire, surtout qu’il traque les moudjahidine sur son territoire et dans les pays voisins (…) et qu’il est un allié sûr des Américains et des juifs ». Bref, le vernis sémantique habituel pour habiller le message, aussi crédible que le fameux « Allah is great » des enveloppes poudrées à l’anthrax que les média ont brusquement zappé quand la « signature » génétique des bactéries indiquait indiscutablement que le bacille toxique provenait des laboratoires militaires… américains.
Revenons un peu sur les informations délivrées par la dépêche… Il est question d’un scénario similaire à celui qui s’était déroulé en Espagne. Soit des attentats sanglants perpétrés juste avant les élections, dans des gares et aux heures de pointe. Terrifiant donc. Ces carnages et l’annonce précipitée par les autorités de la certitude de la piste ETA en dépit de la « signature » terroriste (instantanéité des bombes, explosifs déclenchés par des portables), avaient fait tomber le gouvernement Aznar accusé de « mensonge d’état » pour porter au pouvoir les socialistes de Zapaterro. La mouvance Al Quaida faisait ainsi payer au gouvernement de droite d’Aznar son alignement servile sur l’Empereur de pacotille, Bush, en influant directement sur le résultat des urnes. Rien à voir donc avec la situation actuelle puisque notre pays s’est distingué justement par son refus de s’aligner docilement sous la bannière étiolée notamment à propos du dossier irakien. Or, il se trouve que l’une des menaces identifiées provient de la filière irakienne. Pas très logique…
Une faille dans le montage qui a été comblée par les instigateurs de la manœuvre puisque l’on y a ajouté prestement un message de Ben Laden en personne qui exhorte ses islamistes déments en présentant la France comme une nation qui « soutient de toutes ses forces la clique de mécréants qui gouverne en Algérie d’une main de fer » et un Etat qui « traque les moudjahidine sur son territoire et dans les pays voisins (…) et qu’il est un allié sûr des Américains et des juifs ». Voilà la justification qui a tout d’un charabia et d’une dialectique tordue surtout lorsqu’il s’agit de présenter la France comme « un allié sûr des Américains et des juifs ». Les multiples incidents qui ont mis en scène les forces françaises de la FINUL et l’aviation israélienne au Liban et la récente et très dure saillie du premier ministre Dominique de Villepin sur la guerre d’Irak et la gestion calamiteuse du dossier par les USA (lien libération) ne plaident pas en faveur de l’allié fidèle et dévoué… Quant au dossier algérien évoqué, c’est une vieille rengaine qui est remise au goût du jour même si ce pays est encore régulièrement victime d’attentats imputés au GSPC (lien Euronews), un groupe terroriste très affaibli également épinglé dans le rapport comme une menace éventuelle. Autre étrangeté, Ben Laden, présenté comme mort et enterré (voir ressources du site) depuis un bon moment, réapparaît comme un diable qui sort de sa boîte pour les besoins de la cause…
Que faut-il donc en penser ? Plusieurs hypothèses se bousculent et s’entrechoquent et il est bien difficile de démêler l’intoxication et les sources afin de juger de la fiabilité du rapport en question à l’origine de l’information. La donnée qu’il faut retenir reste celle d’une possibilité que des attentats interfèrent dans la campagne électorale française. Un noyau d’information qui est corroboré par un article publié quelques semaines auparavant par le Monde du 7 février (lien) qui témoignait que les Renseignements généraux restaient « attentifs » à l’hypothèse d’attentats en pleine période électorale. Une nouvelle plutôt étonnante apparue de nulle part ou presque. Il y a donc eu une première fuite publiée par le Monde avant que le journal londonien Al-Hayat n’apporte d’utiles précisions un peu plus tard. La divulgation est belle et bien orchestrée à destination de deux publics bien distincts et la deuxième « couche » est venue combler les zones d’ombre de la première. La question qui se pose ensuite est celle-ci ? A qui profiterait le crime ? Comme à chaque fois que l’on s’approche de la nébuleuse Al Quaida, un rideau de fumée se lève et le flou s’installe sur les réelles motivations du groupuscule virtuel et les connivences ne sont pas celles que l’on imagine de prime abord.
 
 
Des attentats perpétrés en France en pleine frénésie électorale provoqueraient instantanément un durcissement de l’opinion publique et un glissement immédiat de la campagne en cours vers des thèmes chers à la Droite comme la sécurité et le terrorisme. Il se trouve que le candidat Sarkozy est justement celui qui est crédité par l’opinion publique d’une certaine compétence sur ces graves sujets. Troublante corrélation. Il apparaîtrait donc comme l’homme de la situation d’autant qu’il est déjà dans les faits, « le premier flic de France ». Un mandat qu’il semble vouloir prolonger jusqu’au bout du bout pour des raisons énoncées par l’un de ses porte-flingues, Patrick Devedjian. Ce dernier expliquait il y a peu que Nicolas Sarkozy ne pouvait démissionner en raison… des menaces terroristes qui pèsent sur notre pays. Ah bon ? Le sbire en question a des informations ou des prémonitions ?
 
 
Loin de changer complètement le cours de l’histoire comme en Espagne, des attentats d’Al Quaeda en France seraient finalement une « aubaine » pour le candidat de Droite et la plus sûre manière de faire basculer définitivement l’opinion vers un type de gouvernement policier, répressif et paranoïaque. Une transformation encore plus radicale du paysage politique national qui esquisse parfaitement Nicolas Sarkozy, le clone de George Bush. Implacable logique. De plus, en cas de carnage, les promesses électorales de changement émises par la candidate socialiste sembleraient soudainement bien fades et seraient instantanément reléguées au second plan du fait de l’urgence et du lourd climat. Ségolène Royal perdrait ainsi toute change de réussite et la France, durement touchée dans sa chair et ses certitudes, basculerait définitivement du côté de l’Empire du Bien qui combat justement ces fondamentalistes (réunis en cénacle par la CIA rappelons-le).
 

Al Quaeda, le rideau de fumée idéal pour masquer les sombres manœuvres
 
 
A qui donc profiterait le crime ? Qui pourrait ainsi téléguider Al Quaeda de telle manière que ses agissements confortent finalement le camp des « faucons » ? Voilà une troublante constatation qui n’est pas vraiment nouvelle puisque la nébuleuse s’est maintes fois signalée comme le meilleur porte-parole de la Maison Blanche, apparaissant au moment opportun avec les messages caricaturaux qui conviennent…à l’opinion publique américaine. Ce synchronisme entre les communications du groupuscule énigmatique et les besoins de l’équipe Bush à telle ou telle période de turbulence politique, est une évidence pour tout observateur attentif. Il faut bien se mettre à l’esprit qu’Al Quaeda n’existe pas en tant que tel et que ce flou considérable permet bien des manipulations et que le groupe s’avère surtout être le rideau de fumée idéal pour masquer bien des sombres manœuvres de la part de tel ou tel Etat.
 
 
On pourrait par exemple s’étonner que le mouvement de Ben Laden vitupère à l’infini contre les Israéliens et l’occupation de la Palestine, la dynamo même de son prosélytisme, sans jamais avoir frappé les intérêts de l’état hébreu ou commis la moindre action significative sur ce territoire. Même interrogation sur les attentats du 11 septembre nimbés de troublants mystères et de zones d’ombre innombrables. Le chef des commandos terroristes, Mohammed Atta, avec un mandat d’arrêt lancé contre lui à l’échelle internationale, a quand même bénéficié d’un entraînement spécial dans une base américaine quelques mois avant le 11 septembre comme le dévoile Michael Ruppert dans son livre « franchir le Rubicon » dont on reparlera bientôt. Tout comme l’affaire Moussaoui, ce pirate de l’air pitoyable qui a failli tout faire rater mais la bienveillance de certains services (FBI, CIA entre autres) pour bloquer l’information pourtant gravissime, a fait le reste. La liste des incohérences est si longue que l’on passera assez vite sur cette « divine surprise » pour le mandat vacillant de Bush après des élections notoirement truquées. Ultime interrogation pour aller au bout de l’analyse : pourquoi cette fuite à deux vitesses distillée par les RG ?
 
 

Tuer la poule dans l’œuf
 
 
Là encore il faut rester prudent quant à l’interprétation même si les fuites semblent parfaitement maîtrisées et que les circuits de distribution de l’information choisis visent deux auditoires bien distincts. La plus probable des hypothèses est celle d’un projet d’attentats terroristes mis à jour par les RG et que l’on a pris soin d’ébruiter pour tuer la poule dans l’œuf. En donnant des indications précises et circonstanciées sur le modus operandi de l’action terroriste, le service indique à l’adversaire présumé, son degré d’information et l’état d’avancement de son enquête. C’est également une manière de signaler aux véritables commanditaires qui « louent » les services d’Al Quaeda que le complot est éventé et que l’on sait…
 
 
Indirectement, ces informations fonctionnent comme une discrète mise en garde de l’opinion publique contre tout risque de manipulation. C’est exactement ce que les services américains ont fait en torpillant régulièrement les campagnes mensongères de l’administration Bush d’où des représailles en cascades et un remaniement orienté à la tête de ces services. Quant à Al Quaeda, on pourrait ajouter que cette garde prétorienne des intérêts des fondamentalistes musulmans est décidément bien surprenante puisque le dernier message en date de la nébuleuse appelle à frapper les intérêts pétroliers, cette source de revenus de bien des pays du Golfe et d'ailleurs.
 
« Tous les sites pétroliers dont la production alimente les Etats-Unis doivent être pris pour cibles, pas seulement au Moyen-Orient, mais aussi au Canada, au Venezuela ou au Mexique, affirme la branche saoudienne d'Al Qaïda » indique une dépêche de Libération (lien). Là aussi le véritable sens de la menace est enrobé sous des prétextes fantaisistes de rupture de la chaîne d’approvisionnement pétrolier des USA. Otez le Canada et le Mexique cosmétiques et il vous reste… le Venezuela d’Hugo Chavez, ennemi juré de George Bush. Al Quaeda appelle donc à combattre le Venezuela en se justifiant plus ou moins habilement. Voilà encore une sacrée surprise… Pour qui travaille donc réellement cette centrale terroriste crée à l’origine par la CIA ? Voilà une bonne question et une raison supplémentaire pour rester vigilants…
 

 
 
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CC Jung

Publié dans Omegactualité

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