Le village Potemkine du chômage

Publié le par cc jung in effect

La facture sociale
 
Il y a des pavés qui tombent à pic, non pas sur la maréchaussée mais dans un contexte social où les mots et les annonces tentent de grimer la réalité du malaise ambiant et du mécontentement. Ce pavé salutaire est le témoignage accablant d’une employée de l’ANPE, Fabienne Brutus, qui raconte dans un livre passionnant l’envers du décor et du village Potemkine que nous vendent nos communicants institutionnels.
Au moment même où les cortèges de manifestants s’ébranlent pour faire vaciller définitivement le contrat moribond, au moment même où notre ministre de l’économie rêvée se repaît d’une débauche de chiffres satisfaits, « Chômage, des secrets bien gardés » jette un pavé dans la mare aux illusions où se mirent les souriants fossoyeurs du réel. Le taux de chômage véritable en France, non pas celui des annonces triomphales et surréalistes, est bien de 19 % de la population active, très loin des « baisses permanentes » claironnées par notre gouvernement.

Economie d'âme....

L’autosatisfaction affichée par ce dernier à chaque « baisse consécutive » résonne comme une indécence cynique, dérangeante et méprisante. C’est sans doute cette même impression ressentie qui guide les pas des manifestants dans nos rues, le CPE servant de catalyseur à l’insatisfaction. Les placards de l’économie grouillent de trop de fantômes que des chiffres ont fait disparaître, ils sont même pleins à craquer…
La fracture sociale que ce gouvernement omnipotent (un accident de l’histoire électorale), prétendait combler, se révèle un immense gouffre quatre ans plus tard. Une entaille profonde, le lit d’une rivière de la désespérance que nos jeunes refusent d’emprunter à leur tour. Solder l’avenir d’une génération était sans doute une lucrative « réforme » dans la tête féconde de notre élite marchande mais c’est elle aujourd’hui, qui est au bord de la faillite institutionnelle, à un orteil de la banqueroute politique. La facture de la fracture sociale est tombée.

 
« Le Monde - Le vrai nom de Fabienne Brutus est Fabienne Brutus. Ce n'est pas un pseudonyme, comme pourraient le laisser penser les banderilles que cette jeune femme de 31 ans vient planter dans le dos de son employeur, l'ANPE. L'illustre Agence nationale pour l'emploi a déjà subi sur sa droite, jeudi 23 mars, un rapport sévère de la Cour des comptes. Une semaine plus tard, la voilà attaquée sur sa gauche par l'une de ses propres conseillères aux airs de fillette sagement insolente, qui dégaine ce pamphlet culotté : Chômage, des secrets bien gardés. Où elle épingle gabegie, chiffres faussés, radiations abusives, paperasserie inefficace, argent public gaspillé. (…)
"Je m'étais fait une idée des dysfonctionnements de l'ANPE, mais j'étais loin d'imaginer l'ampleur des dégâts,raconte-t-elle. En arrivant, je me suis dit : je vais changer les choses, proposer des formations. Mais il n'y a rien de proposable. Sauf pour les métiers "en tension" (pour lesquels les offres sont nombreuses), l'Assedic ne paye pas de formation. On ne peut pas faire notre métier correctement. Nous sommes 23 000 agents pour accompagner 4 millions de chômeurs."
 
Fracture fractale
Total estimé : 5 millions de chômeurs en France
 
Le dénombrement des chômeurs est le point de départ du livre. Les chiffres sont publics, mais le Bureau international du travail définit le chômage en retenant la seule "catégorie 1". Définition : "personne sans emploi, immédiatement disponible, recherchant CDI à temps plein". Ne sont pas comptabilisées dans le chiffre final les sept autres catégories (personnes non disponibles immédiatement parce qu'en formation, personnes recherchant CDD ou CDI à temps partiel, etc.). "L'obtention de n'importe quel contrat précaire, occupation momentanée, stage de formation, fait évidemment glisser vers une catégorie "off"."
A l'automne 2005 étaient ainsi déclarés en France 2 millions et demi de chômeurs, et l'on se félicitait d'être passé sous la barre psychologique des 10 % de la population active. Or, toutes catégories confondues, ils étaient un peu plus de 4 millions inscrits à l'ANPE à la même époque : soit 15 % de la population active. S'y ajoutent les jeunes non indemnisés, les vieux dispensés de recherche d'emploi, les RMistes non inscrits ou encore ceux qui, par lassitude, abandonnent le pointage : un bon million de personnes en plus, selon Fabienne Brutus. Total estimé : 5 millions de chômeurs en France. 19 % de la population active... (…)
 
Marion Van Renterghem
 
 
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Publié dans Omegactualité

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